< Previous20 © CFNEWS - MAGAZINE -DÉCEMBRE 2023 MARCHÉ REPENSER SON BUSINESS MODEL U tile en phase de production de la documentation, l’IA serait toutefois bien moins efficace pour la négociation des transactions, de même qu’en aval des opé- rations. « Grâce à l’IA, nous partagerons probablement avec les fonds des analyses plus rapides, plus pointues et plus déter- minantes. Mais le rôle des consultants reste ensuite crucial pour mettre en œuvre ces recommandations auprès des équipes de management », estime Nicolas Richard, UN NOUVEAU TREMPLIN POUR L’ESG CSRD, taxonomie, SFDR… La réglementation inflationniste en matière de durabilité est source d’innovation pour l’IA. Certaines ont, notamment, introduit la nécessité pour les sociétés de gestion de démon- trer que leurs participations ne génèrent pas d’impacts négatifs sur la société. Ouvrant ainsi un boulevard à SESAMm, spécialisé dans la détection des controverses via l’analyse de milliers de documents publics. « Alors qu’une agence de notation classique couvre en général 10 000 sociétés, l’IA nous permet d’en analyser 5 millions », assure Sylvain Forté, fondateur de cette solution qui compte parmi ses clients 7 des 10 plus gros fonds de pri- vate equity au monde (Carlyle, Sylvain Forté, fondateur de SESAMm Warburg Pincus…). La fintech créée en 2014, ayant récem- ment levé 35 M€ notamment auprès d’Elaia, apparaît ainsi complémentaire à Sirsa, Novata ou Greescope qui s’intéressent, elles, à la donnée privée des sociétés. Les fonds de capital-in- vestissement, qui constituent 60% de sa clientèle, l’utilisent aussi bien en due diligence que pour le suivi de leurs par- ticipations. Concrètement, les équipes de SESAMm ont ap- pris à leur solution propriétaire -TextReveal ® - à se comporter comme un analyste ESG, tout en lui imposant d’agir dans un cadre réglementaire qu’ils lui ont préalablement expliqué. « En tant que couche applicative et experte, nous promptons et entraînons le modèle à effec- associé, membre du comex en charge des activités de conseil de KPMG en France. Reconnaissant pour autant : « En deal ad- visory, notre enjeu permanent est d’arri- ver à apporter ces technologies dans les process ‘at deal speed’ ». La collaboration homme-machine semble donc pour l’heure inévitable… avec quelques ajustements à prévoir sur les fiches de poste. « Le temps des collaborateurs autrefois dédié en par- tie à la collecte des données brutes est dé- sormais principalement affecté à la vali- dation et à la production d’informations à plus forte valeur ajoutée », note Arnaud tuer des tâches très spéci- fiques, qu’il ne peut pas faire par défaut », développe Sylvain Forté. Si l’outil ne se substitue pas encore à l’humain, l’ap- parition de ChatGPT 4 pour- rait bien rebattre les cartes. « L’émergence de la GenAI a permis à notre solution de diviser par deux le nombre de faux positifs et, par là même, de s’approcher un peu plus d’une qualité d’analyse ESG humaine », constate le jeune dirigeant.Partenaire des ambitions de nos clients : fonds d’investissements et dirigeants de PME, ETI et grands groupes. Notre département Financial Advisory vous accompagne, en France ou à l’étranger, au travers de Due Diligence (finance, fiscal, social et ESG), lors d’un accompagnement M&A (cession, acquisition, financement). www.nexia-sa.fr22 © CFNEWS - MAGAZINE -DÉCEMBRE 2023 Mercier. Cette nécessaire intervention humaine (pour valider que le chiffre pré- senté comme étant un Ebitda en est bien un, que les entreprises ne sont pas pré- sentes en doublon dans le système sous des noms différents, etc.) ouvre d’ailleurs un boulevard aux cabinets de conseil dé- diés à la structuration des équipes. « Le développement de l’IA sera pertinent s’il intègre l’humain. Il s’agira de penser les usages et de s’y adapter, de redessiner les organisations pour que les technologies apportent un bénéfice et pas seulement un coût supplémentaire », avertit Nicolas Richard. Toutes les fonctions, cependant, ne pourront pas être remplacées par l’IA. « La levée de fonds restera un exercice où l’équipe d’investissement doit être en première ligne. L’IA aura sans doute peu de valeur ajoutée, à part peut-être dans la communication entre GPs et LPs sur la durée d’investissement », affirme Rémy Boulesteix. De même chez Jolt, on pré- fère faire monter en grade les juniors pour en faire de jeunes partners, tandis que Simon Associés « met en avant les jeunes avocats les plus ouverts sur les su- jets d’IA ». Mais encore faut-il qu’ils soient aptes à s’approprier ces nouvelles techno- logies. Or, si le Conseil National des Bar- reaux aurait demandé aux écoles d’avocats d’enseigner aux étudiants à rédiger des prompts, selon Aurélie Klein, « l’IA risque d’atrophier la gymnastique juridique des jeunes avocats et leur appétence à réfléchir par eux-mêmes, à être créatifs ». Amenant peut-être le risque, donc, de voir un jour l’intelligence humaine dépassée par l’intel- ligence artificielle… Mistral AI se lance avec du vent dans les voiles Un responsable des données chez Raise SESAMm analyse cinq nouveaux investisseurs À LIRE AUSSI… MARCHÉ L’IA RISQUE D’ATROPHIER LA GYMNASTIQUE JURIDIQUE DES JEUNES AVOCATS ET LEUR APPÉTENCE À RÉFLÉCHIR PAR EUX-MÊMES AURÉLIE KLEIN, RESPONSABLE INNOVATION DE FIDAL Interrogez la base de deals CFNEWS en temps réel Optimisez vos recherches depuis votre CRM Enrichissez vos bases de données Booster votre CRM avec notre API RÉGIONS Clément Fayard PARIS - IDF Pierre-Alexandre Laquitaine cfnews.net24 © CFNEWS - MAGAZINE -DÉCEMBRE 2023 Image générée par de l’IA pour CFNEWS25 © CFNEWS - MAGAZINE - DÉCEMBRE 2023 L’ARRIVÉE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE À VITESSE GRAND V OBLIGE LES ACTEURS DU CORPORATE FINANCE À RENFORCER LEUR ÉQUIPEMENT EN CYBER-SÉCURITÉ, MAIS AUSSI À CONSI- DÉRER ATTENTIVEMENT LE CADRE LÉGISLATIF. MARCHÉ AURORE BARLIER A lors que certaines tech- nologies permettent au- jourd’hui d’enregistrer ou traduire des conversations et de retrans- crire un mémo d’investissement, des pré- cautions d’usage s’imposent. La plupart des fonds et conseils ont dû redoubler d’efforts face au caractère sensible de la donnée désormais manipulée en masse par les outils d’IA auxquels ils ont recours. « Quand on développe sa propre suite d’ou- tils, il est important d’être particulièrement bien équipé en termes de cybersécurité », IA À ENCADRER DES USAGES pose Jérémy Foucray, CTO de Cambon, qui a fait le choix de s’appuyer sur d’Okta et d’héberger ses données chez MangoDB et AWS. Lorsque la donnée analysée est is- sue de pitches ou de notes d’investissement, Alexis Deudon, CDO de Raise, préconise à ses équipes de ne pas utiliser ChatGPT, mais plutôt BingChat, une solution de Mi- crosoft qu’il juge plus sûre. « L’interrogation de documents par le langage naturel pose à la fois des questions de sécurité (l’accès à la donnée est souvent contraint par des NDAs), mais aussi de scalabilité : ChatGPT 26 © CFNEWS - MAGAZINE -DÉCEMBRE 2023 MARCHÉ A utant de problématiques potentielles qui, couplées à l’essor exponentiel de l’IA, ont amené le régulateur à prendre ses dispositions. En a découlé, cette année, l’ « AI Act », une proposition législative de l’Union européenne. « Ce règlement euro- péen est l’un des premiers à intégrer une gestion de risques pour les entreprises. Par conséquent, les règles appliquées aux solu- tions d’IA et aux utilisateurs varient selon l’atteinte portée à la vie privée des individus », exprime Aurélie Klein. À l’heure où les so- lutions d’IA pullulent et lèvent des fonds à un rythme soutenu (voir le tableau page 16), le cabinet pourrait donc avoir du grain à moudre pour conseiller les fournisseurs de solutions, tant sur la faisabilité de leur projet que sur l’information à apporter aux utilisateurs concernés et sur le volet de la cybersécurité. Ceux-ci promettent pour- tant d’être de plus en plus nombreux, la GenAI et le nouveau champ des possibles qu’elle ouvre aux dirigeants, notamment du non-coté, amenant une démocratisa- tion de ces solutions… concomitamment à un risque de morcellement technologique néfaste. « Si les entreprises multiplient les solutions d’IA générative, elles risquent d’augmenter les problèmes d’interface et de cohérence tant dans la donnée que dans l’exploitation des informations », prévient Rémy Boulesteix, associé, responsable deal advisory de KPMG en France. UNE GESTION DES RISQUES INTÉGRÉE À LA LOI et ses alternatives ne gardent en mémoire qu’un contexte assez limité, l’équivalent de quelques pages », complète le responsable, qui se fait accompagner, par ailleurs, par Qontrol, un DPO (délégué à la protection des données) externalisé à temps partiel. Au-delà des éventuelles fuites de la data manipulée, c’est la nature même de cette dernière qui est parfois remise en cause. « À mon sens, l’un des gros travers de l’IA générative pourrait être l’opacité de l’ori- gine de ses sources et un risque de manque de fiabilité », exprime Aurélie Klein, res- ponsable innovation de Fidal. MUTLTIPLIER LES SOLUTIONS D’IA GÉNÉRATIVE PRÉSENTE UN RISQUE RÉMY BOULESTEIX, ASSOCIÉ, RESPONSABLE DEAL ADVISORY DE KPMG EN FRANCE www.cfnews.tv STUDIO TV CFNEWS - 50 avenue de la Grande Armée - Paris 17 e INTERVIEWS PODCASTS TABLE-RONDES EVENTS MEDIA-TRAINING EN IMAGES ET VOS EXPERTISES ACTUALITÉ VOTREALORS QUE LES VALORISATIONS CHUTENT, QUE LES TOURS DE PLUS DE 100 M€ SONT DEUX FOIS MOINS NOMBREUX CETTE ANNÉE ET QUE SEULEMENT DEUX LICORNES SONT NÉES DE JANVIER À NOVEMBRE 2023, LA RENTABILITÉ APPARAÎT COMME NOUVELLE BOUSSOLE POUR L’ÉCOSYSTÈME, SAUF POUR L’AMORÇAGE TOUJOURS DYNAMIQUE. BAPTISTE RUBAT DU MÉRAC L a fête est bel et bien finie pour l’écosystème tech. L’essor de l’activité, jusqu’à l’euphorie gé- néralisée entre les étés 2020 et 2022, a lais- sé la place à un reflux marqué depuis plus d’un an. Le capital-innovation a perdu la moitié de ses montants au premier se- mestre 2023 et les valorisations moyennes sont redescendues à des niveaux de 2019 voire d’avant. En cause, le ralentissement CAPITAL INNOVATION RETROUVENT LES ACTEURS DE LA TECH LA RAISON 28 © CFNEWS - MAGAZINE -DÉCEMBRE 2023 Image générée par de l’IA - didiksaputra Adobe Stock29 © CFNEWS - MAGAZINE - DÉCEMBRE 2023 économique et la hausse des taux d’inté- rêt détournant les LPs du capital-inves- tissement, en particulier du segment plus risqué du financement de l’innovation, et alimentant la baisse des marchés publics. Le Nasdaq n’a pas connu d’effondrement néanmoins puisque l’indice phare de la tech américaine, considéré comme précur- seur du non-coté, n’a abandonné que 6,6 % de janvier à fin novembre, et même gagné 15 % en novembre. Pas de quoi espérer malgré tout un nouveau cycle de croissance rapidement. « Le recul très fort des valori- sations, en late stage surtout, est loin d’être terminé. Nous n’en sommes qu’à la moitié du chemin », estime Raphaëlle d’Ornano, associée fondatrice du cabinet d’audit juri- dique et financier d’Ornano + Co. L e retournement de tendance appa- raît particulièrement marqué dans le domaine des levées de fonds. « Ce mar- ché est gelé. Même s’ils continuent en ap- parence de jouer le jeu et montrent une motivation, la plupart des fonds ont fer- mé leurs investissements. Ils disent vou- loir revenir courant de l’année prochaine », constate Jean-Philippe Jacob, associé au sein du cabinet d’avocats Yards. Un pe- tit filet alimente encore les tours à trois chiffres en millions - sept en 2023 contre quinze à même époque l’année dernière -, mais seules deux licornes, aux activités bien RARÉFACTION DES TOURS DE PLUS DE 100 M€ différentes des autres, ont vu le jour de jan- vier à novembre 2023. Le producteur de batteries Verkor, financé surtout par des fonds d’infrastructure et des industriels, et le fabricant d’une LED pour écrans Aledia, tous deux grenoblois, sont d’ailleurs représenta- tifs d’une évolution des levées les plus signi- ficatives vers des jeunes entreprises au pro- fil très industriel, en lieu et place d’éditeurs Saas ou de places de marché. Toute la chaîne de financement n’est toutefois pas touchée de la même manière. « Le seed et dans une moindre mesure la série A restent actifs, alors que les segments suivants, à partir de la série B, sont franchement grippés, relève Antoine Ganancia, managing partner chez la banque d’affaires Clipperton. Cette pénurie de liqui- dités dans ces phases de développement est ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DU NOMBRE DE TOURS EN CAPITAL-INNOVATION 2019 32,2% 39,7% 35,7% 37,2% 40,4% 40,1% 11,6% 8% 38,5% 15,1% 9,1% 40,3% 14,3% 9,6% 37,8% 13% 9,5% 43,7% 15,2% 9% 2020202120222023 Sources : CFNEWS / Sociétés Amorçage (seed) 1 er tour (A) 2 e tour (A) 3 e tour C et +Next >